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GOUVERNEMENT FÉDÉRAL.

plus aussi l’application du système de l’élection au chef de l’État devient dangereuse.

La politique des Américains vis-à-vis du monde entier est simple ; on pourrait presque dire que personne n’a besoin d’eux, et qu’ils n’ont besoin de personne. Leur indépendance n’est jamais menacée.

Chez eux le rôle du pouvoir exécutif est donc aussi restreint par les circonstances que par les lois. Le président peut fréquemment changer de vues sans que l’État souffre ou périsse.

Quelles que soient les prérogatives dont le pouvoir exécutif est revêtu, on doit toujours considérer le temps qui précède immédiatement l’élection, et celui pendant lequel elle se fait, comme une époque de crise nationale.

Plus la situation intérieure d’un pays est embarrassée, et plus ses périls extérieurs sont grands, plus ce moment de crise est dangereux pour lui. Parmi les peuples de l’Europe, il en est bien peu qui n’eussent à craindre la conquête ou l’anarchie, toutes les fois qu’ils se donneraient un nouveau chef.

En Amérique, la société est ainsi constituée qu’elle peut se soutenir d’elle-même et sans aide ; les dangers extérieurs n’y sont jamais pressants. L’élection du président est une cause d’agitation, non de ruine.