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DE LA DÉMOCRATIE EN AMÉRIQUE.

Deux exemples feront parfaitement comprendre la pensée du législateur.

La constitution interdit aux États le droit de faire des lois sur la circulation de l’argent ; malgré cette prohibition, un État fait une loi semblable. Les parties intéressées refusent d’obéir, attendu qu’elle est contraire à la constitution. C’est devant un tribunal fédéral qu’il faut aller, parce que le moyen d’attaque est pris dans les lois des États-Unis.

Le congrès établit un droit d’importation. Des difficultés s’élèvent sur la perception de ce droit. C’est encore devant les tribunaux fédéraux qu’il faut se présenter, parce que la cause du procès est dans l’interprétation d’une loi des États-Unis.

Cette règle est parfaitement d’accord avec les bases adoptées pour la constitution fédérale.

L’Union, telle qu’on l’a constituée en 1789, n’a, il est vrai, qu’une souveraineté restreinte, mais on a voulu que dans ce cercle elle ne formât qu’un seul et même peuple[1]. Dans ce cercle, elle est souveraine. Ce point posé et admis, tout le reste devient facile ; car si vous reconnaissez que les États-Unis, dans les limites posées par leur constitution, ne forment qu’un peuple, il faut bien leur accorder les droits qui appartiennent à tous les peuples.

Or, depuis l’origine des sociétés, on est d’accord sur ce point : que chaque peuple a le droit de faire

  1. On a bien apporté quelques restrictions à ce principe en introduisant les États particuliers comme puissance indépendante dans le sénat, et en les faisant voter séparément dans la chambre des représentants en cas d’élection du président ; mais ce sont des exceptions. Le principe contraire est dominateur.