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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

distances incalculables. Aucune vapeur ne flottait dans l’air ni sur les monts. Les perspectives apparaissaient distinctes et rapprochées. La vue n’était bornée qu’au sud, par les montagnes du Cantal, qu’on eût dites à portée de la main. À l’est, deux gros points blancs, rosés, semblables à deux pains de sucre énormes, se détachaient au-dessus d’un ligne vague : c’étaient deux montagnes des Alpes toutes couvertes de neige.

Chacun se récriait, donnant cours de diverses manières à son enthousiasme. Hans Meister ne bougeait pas de son cube de granit. Quand un des guides montra les Alpes, il redressa un peu sa longue taille, et voulut voir ; mais ses yeux louches, pour regarder les Alpes étaient fixés du côté des Pyrénées.

Plus près des touristes, de petits lacs miroitaient comme au pied même du puy de Sancy. Gorges, vallons, montagnes accusaient sensiblement leur relief.

Le plaisir de Jean n’était pas sans mélange ; il ne perdait pas de vue son Allemand ; et lui aussi il semblait loucher en regardant les Alpes et en même temps le compère Hans.

— N’ayez pas peur, mon petit, lui dit un des guides qui avait entendu les explications données au jeune Anglais. Ce serait un cabri qu’il ne m’échapperait pas !

Pour plus de sûreté, Jean aborda enfin l’associé de Jacob Risler.

— Vous ne vous attendiez pas à me retrouver ici, lui dit-il, après m’avoir laissé au fond de la forêt du Falgoux ?

— Priant pardon, qui est-ce ? Ah ! oui, je te vois d’un œil favorable, mon petit Risler : car c’est bien toi ?

— Oui, c’est moi, dit le petit Parisien. Je suis en mesure de vous donner des nouvelles de votre associé. Il est à Mauriac à l’hôpital de la prison, ainsi que mon pauvre ami Bordelais la Rose. C’est là votre œuvre…

— Il n’est pas pour mourir, Jacob ? dit l’Allemand.

— Je ne pense pas.

— Tant pis !

— Comment tant pis ?

— C’est tant mieux, que je voulais dire.

— Bon ! maintenant un mot : J’ai besoin de vous… J’ai recours à vous…

— Oui, parfaitement, mon petit, mais une autre fois.

— Non, pas une autre fois ; tout de suite… demain ; il me faut faire un petit voyage… je compte sur vous pour m’accompagner… vous concevez ? un