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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

teau en suivant les indications de l’homme de lettres, dont la vive intelligence et l’esprit présent suppléaient presque à l’affaiblissement de la vue ; c’est ainsi qu’à travers les ruelles tortueuses de la vieille ville il s’arrêta devant plusieurs anciennes maisons sculptées et les restes de quelques hôtels de la Renaissance. On sait que Blois est bâti en amphithéâtre, et dans une situation pittoresque sur une colline escarpée de la rive droite de la Loire, laquelle s’arrondit en un demi-cercle dont les extrémités s’appuient au fleuve ; sur l’une s’élève le château, sur l’autre la cathédrale, bel édifice de la fin du dix-septième siècle, la ville occupant l’espace intermédiaire, avec le pont, au centre, qui met le faubourg de Vienne en communication avec elle.

Quand on fut arrivé, M. Pascalet dit à ses amis :

— Regardez bien, mes enfants, vous qui pouvez tout voir. Cette large façade avec ses trois galeries superposées, c’est l’œuvre de bien des siècles ! Ce château n’a pas toujours eu l’aspect qu’il présente ; il a d’abord été une forteresse féodale, et il n’a plus l’air d’une forteresse, n’est-ce pas ? Il se compose, vous le verrez, de quatre corps disposés autour d’une cour. Le plus ancien, des douzième et treizième siècles, renferme la salle des États ; la chapelle de Saint-Calais et le corps de bâtiment dans lequel s’ouvre la porte principale ont été construits par Louis XII ; la façade nord date de François Ier ; la façade de l’ouest, élevée par Gaston d’Orléans, a eu le premier Mansard pour architecte : c’est la plus régulière assurément, mais elle n’offre pas les curieux détails d’architecture des trois autres façades, bien que celles-ci soient un peu lourdes. — L’aile de François Ier est une des plus belles œuvres de la Renaissance ; la tourelle de l’escalier octogonal, aérien, brodé de festons à jour, où le chef de la dynastie des Valois a mis sa salamandre, est sans conteste une admirable merveille.

Un gardien, avisant des visiteurs, s’était approché. C’était un vieux soldat manchot.

— Vincent Isnardon ? Vous ne le connaissez pas ? lui demanda Jean à demi-voix.

— Cet enfant a raison, dit le bon M. Pascalet, c’est par là que nous aurions dû commencer.

— Isnardon, répéta le gardien, non… non… Il y a bien ici un Vincent, mais il s’appelle Coquardeau.

— Qu’est-ce qu’il fait ? dit l’obstiné Jean, s’attachant à la moindre lueur d’espoir. — Coquardeau rappelait cocarde à l’esprit et cocarde, l’armée. Si c’était un surnom ! — Est-ce un ancien soldat ?