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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

— Vous le voyez : ce n’est point par la violence que je peux changer ma situation. Un jour j’adressais à maman Risler une supplication ardente pour essayer de l’apitoyer sur moi ; je l’implorai les larmes aux yeux pour qu’elle me dît si j’avais quelque part en ce monde une mère… une famille…

— Eh bien ?

— Elle n’eut point de pitié… Elle me répondit en me donnant un soufflet ; et elle ajouta : Pleure maintenant, ce sera pour quelque chose.

— Pauvre Sylvia ! fit Jean. Et il saisit les deux mains qui lui étaient tendues.

— Comment m’appelez-vous ?

— Ah ! je ne sais plus ! s’écria le jeune garçon fort troublé. Je voulais dire Emmeline ou Cydalise… ma tête se perd !

La petite baladine sourit.

— J’ai tant de noms, dit-elle… sans compter ceux de mes rôles.

— On demande Stella ! cria une forte voix. En scène ! en scène ! mademoiselle, ajouta une puissante dame, quand elle eut découvert l’héroïne du drame que l’on jouait, s’entretenant avec un étranger.

Cydalise serra les mains de Jean, et lui dit avec expression :

— Au revoir, Jean ! N’oubliez pas que je compte sur vous ! Écoutez votre oncle… Croyez-le… pour l’amour de moi !

Jean en voyant s’avancer la femme de Risler fit un pas vers l’entrée des artistes et se tint immobile, caché par une coulisse, la main sur le verrou de la petite porte. Il hésitait sur un parti à prendre, lorsqu’il aperçut son oncle marchant derrière la grosse dame.

— Où est donc ce coquin de Jean ? demandait-il très haut. Je vais te le présenter m’amour.

Jean s’effraya de cette présentation redoutable… et il s’esquiva.