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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/525

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Vers la fin de mai, la loge de Risler s’était transportée à Chartres. Jean l’avait suivie, en passant quatre jours confondu avec les artistes du petit théâtre, vivant de la vie des comédiens nomades, cajolé par tous, mais souffrant de voir Cydalise dans la familiarité de ses compagnons, blessé de la vulgarité de madame Risler et des façons grossières et brutales de « l’oncle ». Jean nota par écrit les impressions de ce voyage à pied, fécond en incidents comiques.

De Chartres, Risler conduisit sa troupe à Orléans où elle devait se trouver le 1er juin. Jean battit les environs de Chartres ; il alla ensuite au Mans, de là à Angers, où rendez-vous était assigné pour la Fête-Dieu.

Le petit colporteur fut exact : il devança même de deux jours les funambules. Dans son impatience, suspendant son trafic, il rôdait autour de la ville, ne manquant pas de se rendre à l’heure des trains, à la gare du chemin de fer où devait arriver Cydalise. Le reste du temps, il le tuait en flâneries. Il fut entraîné tout d’abord vers les célèbres ardoisières d’Angers, à laquelle sont attachés plus de quatre mille ouvriers, et dont l’exploitation annuelle donne cent cinquante millions d’ardoises.

Revenu vers la ville, Jean marqua bientôt sa préférence pour l’esplanade du Bout-du-Monde, d’où ses regards s’étendaient sur Angers, assis sur un coteau que baigne la Maine, et qui apparaît de là divisée en trois parties par la rivière : la ville proprement dite, la cité, couvrant une petite île, et la Doutre. Près de l’esplanade du Bout-du-Monde, sur un mamelon séparé de la colline par des fossés profonds, Jean voyait se dresser le château d’Angers, vaste parallélogramme enceint de hautes murailles défendues par dix-huit grosses tours : il est bâti en schiste ardoisier, avec des rubans de pierres blanches tranchant vivement sur le fond sombre. La forteresse élevée par Louis IX est devenue une caserne, un arsenal et une poudrière.

Jean avait parcouru la ville dans tous les sens ; tout vu, tout visité — en vrai Parisien, curieux et pressé : la cathédrale, fort belle, dont le portail est surmonté de trois tours, le palais épiscopal attenant à la cathédrale, toutes les églises et chapelles, très nombreuses : on en compte près de vingt, et plusieurs sont classées parmi nos monuments historiques. Il avait vu l’hôpital Saint-Jean, converti en musée d’archéologie, les maisons à façades sculptées des quinzième et seizième siècles, le « logis Barrault, » où l’on a établi la bibliothèque publique et le musée David, les ponts, les boulevards, le jardin de la préfecture, le Mail et son jardin, le monument du roi René, enfin la statue de David d’Angers, œuvre très remarquable de Louis Noël.