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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Comment et pourquoi ils voyageaient sur cette ligne de Périgueux à Figeac, c’est ce qu’on apprendra bientôt.

Oui, Jean pleurait.

— Mon enfant, lui dit le charpentier, il n’est pas défendu d’être impressionnable ; mais pourquoi pleurer maintenant que tout est fini. Tu étais passablement gai depuis Bordeaux…

— Oh ! non ! tout n’est pas fini, dit le jeune garçon, en secouant la tête d’un air découragé.

— Enfin la dame n’en mourra pas, c’est probable ; ce qu’on lui a pris, on le lui rendra, quand on aura mis la main sur les voleurs. Regarde donc plutôt sur ce rocher à pic ; c’est la petite ville de Turenne. Ah ! ça te réveille ce beau nom ! Nous allons arriver à la station. Ce que tu vois là-haut, dominant tout, ces vieilles murailles délabrées avec deux belles tours, ce sont les restes d’un château fortifié qui a été le berceau de la famille du grand guerrier… Je suis déjà venu dans le pays ; j’y ai bu de bien bon vin, dans le temps ; on ne connaissait pas encore le phylloxéra !…

Jean paraissait indifférent à tout ce que lui disait son excellent ami Bordelais la Rose.

Celui-ci s’en aperçut.

— Voyons, secouons-nous un peu, mon petit ! Sac et giberne ! on en verra d’autres. Tiens voilà la station. Regarde, on va transporter le cadavre.

Toutes les têtes étaient aux portières.

— Mais non, dit l’enfant, la dame ne veut pas descendre.

— Elle parle donc ! Je m’en doutais bien ! Alors c’est qu’elle se porte comme toi et moi… et qu’il ne faut plus penser à cette aventure de voyage. Maintenant ça devient l’affaire de la justice… et des journalistes. Voilà un « fait divers » que nous avons vu de près !…

Le train s’était remis en marche.

— Ah ! comme j’ai hâte d’arriver ! dit le petit Jean.

— Nous arriverons, mon fils ! nous arriverons ! Tu ne me demandes pas si j’ai préparé mes poings ?

Pour quoi faire ?

— Mais… pour lui casser quelque chose à ton oncle Risler. Pourquoi serais-je venu, sac et giberne !

— Vous croyez alors que nous allons le trouver à Aurillac ?

— Tu me demandes si je le crois ? Je le crois… d’après toi, puisque tu m’y mènes ! Car c’est ainsi, en vérité : les hommes ne sont plus rien par le temps