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XXIV

NOUVELLE-HOLLANDE


Torrent de Kinkham. — Attaque d’un uid de fourmis. — Je franchis le torrent. — Solitudes. Deux déportés. — Inondation. — Jeux et exercices des sauvage. — Retour à Sidney.

J’avais vu de l’observatoire de l’habitation de M. Oxley le lit du torrent de Kinkham ; c’est de ce côté d’abord que je dirigeai mes pas, car c’est là surtout qu’on m’avait fortement invité à ne pas me rendre, puisque ce torrent est la limite tracée dans la colonie pour les courses des convicts.

Tout déporté qui le traverse est regardé comme déserteur et ennemi ; quelques-uns d’entre eux, voulant se soustraire au châtiment qu’ils ont mérité, le franchissent en dépit des lois, se jettent dans les solitudes éternelles qui se trouvent au delà, vont à la recherche des hordes sauvages, dont ils partagent d’abord la misère ; et plus tard, poussés par la vengeance et la faim, ils se mettent à la tête d’une expédition guerrière, ils se ruent avec des cris farouches sur les habitations sans défense, et mettent tout à feu et à sang. Aussi, le déporté convaincu d’avoir franchi le torrent de Kinkham est condamné, par cela seul, à la peine de mort.

J’arrivai à son lit de roches après une heure de marche à travers quelques bois vierges et de belles et riches plantations dépendantes du château de M. Oxley. Parvenu là, je fis mine de vouloir pousser plus loin, mais mes deux guides épouvantés me donnèrent à comprendre qu’ils ne