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XXXVIII

BRÉSIL

Rio-Jaineiro.

On n’a jamais tout dit en parlant d’un pays aussi beau, aussi merveilleusement fécond que celui dont je vous ai fait connaître la capitale se mirant dans les eaux les plus limpides du monde, et les environs, que j’ai si souvent étudiés avec tant d’amour.

Notre séjour à Rio-Janeiro avait été trop vivement coloré de ces petits incidents qui remplissent la vie, pour que nos vœux ne nous appelassent pas une seconde fois au milieu de cette population de blancs si paresseuse, au milieu de cette mesquine agglomération de noirs si actifs sous la chicotte déchirante. Et d’ailleurs, ce qui amuse et intéresse dans un voyage, ce n’est pas seulement la comparaison d’un sol à un autre, mais encore celle d’un pays avec le même pays, alors que trois années peuvent en quelque sorte vous indiquer les progrès de l’industrie, des arts et de la civilisation. Ceci n’est pas seulement une ville, ce n’est pas une île jetée au milieu des océans : ceci est un vaste empire, ceci est un continent où fleurissent de grandes cités, et l’on est bien aise de comparer les impressions premières aux impressions récentes, afin de s’assurer si l’on avait bien vu d’abord, et de rectifier les erreurs nées du dégoût qui flétrit ou de l’enthousiasme qui égare et embellit.

Rio-Janeiro a quelques maisons de plus ; ses rues sont toujours droites, excepté la rue Droite, comme je vous l’ai déjà dit. Ses pauvres noirs n’ont pas changé de nature ; leurs fatigues sont les mêmes, leurs tor-