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XL

VOCABULAIRES
DE
QUELQUES-UNS DES PEUPLES

QUE NOUS AVONS VISITÉS.

J’ai pensé avec raison que les vocabulaires de quelques peuples sauvages ne seraient pas inutiles dans un ouvrage comme le mien. Le voyageur qui visite les régions lointaines n’a que trop de peine à inspirer de la confiance à des hommes presque toujours disposés à l’attaque dès qu’ils se jugent les plus forts, et le plus souvent encore empressés à le fuir quand ils se supposent les plus faibles, j’ai remarqué mille fois que le meilleur moyen de les apprivoiser était de se mêler à leurs jeux, de partager leurs exercices et, en quelque sorte, d’adopter leur genre de vie. Dès que je répétais une de leurs grimaces, dès que j’imitais un de leurs mouvements, je les voyais, plus jaloux de me plaire, se presser autour de moi et me montrer de nouveaux mouvements et de nouvelles grimaces. Leur langage surtout, si difficile à rendre avec nos sons, était la chose qu’ils se plaisaient le plus à nous enseigner ; et que de fois les avons-nous vus sauter de joie ou rire avec malignité dès que nous saisissions ou estropiions un de leurs mots ou une de leurs phrases. La gaieté a rarement été funeste : aussi MM. Gaimard, Gaudichaud, Bérard et moi