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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome I.djvu/141

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chapitre vingt-sixième.

signale à Longinien ces contradictions. Le problème qu’il lui présente d’abord, avant de s’engager plus avant dans le débat, c’est de définir en quoi consiste le bien vivre. Est-ce dans les pratiques religieuses comme conditions sans lesquelles il n’y a pas de sainte vie ? Est-ce dans l’observance de ces cérémonies comme moyen de parvenir à bien vivre ? La vie sainte et la fidélité aux pieuses pratiques sont-elles une seule et même chose ? Ces questions, dont Augustin voulait faire une sorte de préface à toute controverse sur le christianisme, tenaient au christianisme lui-même. Il s’agissait de la foi et des œuvres, grandes matières traitées avec tant d’autorité par saint Paul.

Longinien répondit sans doute à l’évêque d’Hippone ; mais nous n’avons plus rien de cette correspondance si curieuse, si instructive pour l’étude de ce qui se passait alors dans une certaine région des intelligences. Longinien touche jusqu’aux limites du monde chrétien, et sa physionomie change sous l’empire même de ses efforts pour rester ce qu’il est. En empruntant à la foi nouvelle le dogme d’un Dieu créateur, il laisse bien loin derrière lui toutes les doctrines antiques ; ses dieux, qui ne sont plus que des puissances médiatrices comme nos anges, n’ont plus rien de commun avec le système polythéiste. Il n’a pas d’immenses intervalles à franchir pour arriver à Jésus-Christ, le divin médiateur entre Dieu et l’homme. Les contemplateurs païens, qui avaient le cœur honnête et le goût du vrai, pouvaient-ils rester bien longtemps séparés du christianisme après un débat sincère et sérieux avec un aussi doux génie qu’Augustin ?




CHAPITRE VINGT-SIXIÈME.




Le livre sur le Baptême unique. — Consentius. — Saint Paulin. — Attale. — Lettre de saint Augustin à son clergé et à son peuple. — Retentissement en Afrique de la prise de Rome par Marie. — Sermon de saint Augustin. — Affaire de Pinien à Hippone.

(410-411.)


Les combats contre les donatistes touchent à leur terme. Le livre sur le Baptême unique est un des derniers ouvrages de controverse où l’évêque d’Hippone réfute le parti de Donat. Pétilien de Constantine venait de composer un écrit sur le Baptême unique. Augustin était allé chercher un peu de repos dans une retraite voisine, lorsqu’un prêtre de ses amis, appelé Constantin, lui remit cet ouvrage en le conjurant d’y répondre. Un amas de calomnies à travers un grand fracas de paroles, tel était l’écrit de Pétilien. Le saint évêque consentit à descendre une dernière fois dans le champ du combat contre des adversaires dont il avait tant de fois triomphé. Il adressa son livre à Constantin. Nous n’entrerons pas dans l’examen d’une œuvre qui redit avec des formes plus ou moins nouvelles ce que nous avons entendu de tant de manières. Pétilien soutenait l’unité du baptême, mais exclusivement en faveur du parti de Donat ; Augustin enseigne aussi cette unité, mais il reconnaît la validité du baptême des hérétiques et des schismatiques. Ceux-ci ne peuvent pas plus anéantir le sacrement qu’ils ne pourraient anéantir Dieu. Augustin revient à Agrippinus de Carthage, à son successeur le grand Cyprien, aux soixante et dix évêques qui, réunis en concile sous la présidence d’Agrippinus, soutinrent l’inefficacité du baptême des hérétiques. Pétilien s’appuyait sur l’autorité de ces évêques, principalement sur le grand nom de Cyprien, et l’évêque d’Hippone redisait ce que nous avons vu ailleurs. Pétilien accusait gratuitement le pape Melchiade et plusieurs évêques catholiques d’avoir livré aux païens les Écritures saintes et brûlé de l’encens aux dieux ; Augustin venge leur mémoire[1]. Une phrase de ce livre renferme une petite inexactitude qui ferait croire que Félix d’Ap-

  1. Le IIe livre, ch. 35, de la Revue de saint Augustin, indique, après le livre du Baptême unique, le livre des Maximianistes contre les donatistes, qui est perdu.