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MILLE ET UN JOURS

qui dura près de six heures par suite des retards occasionnés par la foule des passagers qui s’empressaient de rentrer dans leurs foyers, — plus ou moins effrayés qu’ils étaient par les rumeurs en circulation, — un autre incident eut lieu qui me semble assez intéressant pour être raconté un peu en détail.

Dans le compartiment que nous occupions, ma femme et moi, il y avait, — en outre de l’intéressant couple gantois, — quatre autres passagers, dont trois dames autrichiennes, une mère et ses deux filles, et un grand propriétaire de chevaux de course des environs de Charleroi. Ces dames autrichiennes semblaient appartenir à la meilleure société. Elles se rendaient à Ostende, avec l’intention de passer en Angleterre. La mère prétendait que son fils y était étudiant. La discussion s’engagea, on ne sait trop comment, entre le propriétaire de chevaux et les dames autrichiennes. Depuis quatre jours déjà, l’Autriche avait déclaré la guerre à la Serbie. La proposition anglaise suggérant de faire régler l’imbroglio austro-serbe au moyen d’une conférence était dans tous les esprits, et le monsieur de Charleroi qui, soit dit en passant, n’avait pas froid aux yeux, disait carrément son fait à l’Autriche. La dame autrichienne plaidait tout naturellement pour son pays ; elle prétendait que les Serbes étaient fourbes et conspiraient constamment contre l’Autriche. — « Les Serbes, disait le propriétaire de chevaux, je l’admets, ne sont pas intéressants, Madame, mais il y a quelque chose de moins intéressant que les Serbes, ce sont les