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EN PRISON À BERLIN


Fête de Saint-Thomas-d’Aquin, 1916.


Mes bien chers Frères,

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Il y a beaucoup de choses que je ne puis vous dire. Vous me comprenez. La situation anormale que nous avons à subir nous interdit de vous exposer, à cœur ouvert, tout juste ce qu’il y a en notre âme, de meilleur et de plus intime pour vous ; ce qui, venant de plus haut et vous touchant de plus près, est à moi mon plus ferme soutien et serait pour vous, si je pouvais parler, votre tout puissant réconfort ; mais vous ne douterez pas de ma parole, vous me croirez lorsque je vous assure que mon voyage a été particulièrement béni, et que je vous reviens heureux, très heureux.

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Vous avez eu déjà des échos, je pense, des acclamations qui, sur tout le parcours de notre voyage, à l’aller et au retour, en Suisse et en Italie, saluèrent le nom belge.

Supposez même, mes bien chers Frères, que l’issue finale du duel gigantesque engagé, en ce moment, en Europe et en Asie-Mineure, fût encore incertaine, un fait acquis à la civilisation et à l’histoire, c’est, le triomphe moral de la Belgique. En union avec votre Roi et votre Gouvernement, vous avez consenti à la Patrie un sacrifice immense. Par respect pour notre parole d’honneur ; pour affirmer que, dans vos consciences, le droit prime tout, vous avez sacrifié vos biens, vos foyers, vos fils, vos époux, et, après dix-huit mois de contrainte, vous demeurez, comme le premier jour, fiers de votre geste ; l’héroïsme