Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/455

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Tom, ainsi que la plupart de ses camarades, apportait avec lui une malle remplie de vêtements. On les introduisit dans une longue salle où ils devaient passer la nuit, et où étaient déjà rassemblés des hommes de tout âge, de toute taille et de toutes nuances, qui, livrés à une gaieté factice, riaient aux éclats.

« Ah ! ah ! voilà qui va bien ! Donnez-vous-en ! dit M. Skeggs le gardien. Mon monde est toujours si réjoui ! C’est Sambo, à ce que je vois, » dit-il d’un ton approbateur à un gros nègre, qui exécutait quelque ignoble bouffonnerie, cause des bruyants éclats de rires qui avaient accueillis les nouveaux venus.

Tom, comme on l’imagine, n’était pas d’humeur à prendra part au divertissement. Il déposa donc sa malle le plus loin possible du bruyant groupe, et s’assit dessus, le visage tourné vers le mur.

Les trafiquants d’articles humains font des efforts systématiques pour propager parmi leur marchandise une grossière et tapageuse gaieté, comme moyen d’étouffer la réflexion, et de rendre les esclaves insensibles à leur sort. Le régime auquel le nègre est soumis, du moment qu’il est acheté dans le Nord jusqu’à son arrivée au Sud, a pour but unique de tuer sa pensée, de l’abrutir. Le marchand d’esclaves recrute son troupeau dans la Virginie et le Kentucky ; il le conduit ensuite à quelque endroit bien situé et salubre, — souvent à des eaux thermales — pour y être engraissé. Là, les esclaves mangent à discrétion ; et, comme il s’en trouve toujours quelques-uns enclins à la mélancolie, on fait jouer du violon tout le jour, et on les oblige à danser. Celui qui se refuse à être gai, — dont l’âme est encore hantée du souvenir de sa femme, de ses enfants, de son logis, — est noté comme un être sournois, dangereux, et livré par suite à tous les maux que peut engendrer la malveillance d’un homme endurci et irresponsable. La vivacité, l’entrain, les apparences de la gaieté, surtout devant des regardants, leur