Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/552

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chose aux oreilles de Legris, il se mit en fureur, et jura que ceux qui feraient des contes sur le grenier sauraient ce qu’il en était : il les y enchaînerait une semaine. Cet avis coupa court aux causeries, mais n’affaiblit en rien la foi qu’on avait en l’histoire.

Cependant, chacun, de peur d’en parler, évita peu à peu l’escalier qui conduisait au capharnaüm ; le corridor même qui précédait les marches devint désert, et la légende tombait en oubli, lorsqu’il vint à l’esprit de Cassy d’en profiter pour aviver les terreurs superstitieuses de Legris, et tenter l’évasion d’elle et de sa compagne de souffrance.

La chambre à coucher de Cassy était immédiatement au-dessous du grenier. Un jour, sans consulter Legris, elle prit sur elle, de la façon la plus ostensible, de faire transporter tous les meubles dans une pièce à l’autre extrémité de la maison. Les domestiques subalternes, chargés d’opérer le déménagement, allaient, venaient, couraient, rivalisant de zèle et de désordre, lorsque Legris rentra d’une promenade à cheval.

« Holà ! hé ! Cassy ! qu’y a-t-il sous le vent ?

— Rien ; seulement, je veux changer de chambre, répliqua-t-elle d’un ton sournois.

— Et pourquoi, s’il te plaît ?

— Parce que je le veux.

— Pourquoi, diable, le veux-tu ?

— Je désirerais pouvoir dormir quelquefois.

— Dormir ? Eh bien ! qui t’empêche de dormir ?

— Je pourrais vous le dire, si vous voulez l’entendre, répliqua-t-elle sèchement.

— Parleras-tu, sorcière ?

— Ce n’est pas la peine. D’ailleurs, je suppose que vous n’en seriez pas troublé, vous. Ce n’est rien : des gémissements, des coups, des corps se roulant sur le plancher moitié de la nuit, depuis minuit jusqu’au jour.

— Des corps, là-haut, dans le grenier ! dît Legris