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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

humeur, mais en même temps beaucoup plus embarrassante.

« Il est parti, s’écria de nouveau Gustave, il est sur le mont le plus élevé du Caucase, et les vautours aiguisent leurs becs… Et maintenant, dites-moi, Diana… vous serez ma femme, n’est-ce pas ?… Vous serez une mère pour mes enfants ?… Vous transformerez le vieux château de Cotenoir en une agréable demeure ? Vous ne vivrez pas plus longtemps au milieu d’étrangers… Vous viendrez avec ceux qui vous aimeront, qui vous chériront comme une des leurs, comme ce qu’ils auront de meilleur et de plus précieux. Vous donnerez à votre pauvre père un coin auprès de votre feu. Il est vieux et il a besoin d’un gîte où il puisse passer les jours qui lui restent à vivre. Pour lui, Diana, pour moi, pour mes enfants, que votre réponse soit : Oui. Ah ! ne vous pressez pas tant, s’écria-t-il en voyant qu’elle allait parler. Pourquoi être si prompte à prononcer un fatal jugement. Songez d’abord combien de choses dépendent de votre réponse : le bonheur de votre père, celui de mes enfants, le mien ?

— C’est le vôtre seul auquel je doive penser, répondit avec chaleur Mlle Paget. Croyez-vous qu’il me soit si facile de dire : non. Il me serait certainement plus facile de dire : oui. Lorsque vous me parlez de la vieillesse de mon père, moi, qui ai si bien connu les misères de sa vie, il faudrait que j’eusse le cœur bien dur pour ne pas être tentée par l’asile que vous nous offrez. Chacune de vos paroles est une nouvelle preuve de votre bonté, de votre générosité ; mais je ne veux pas vous tromper parce que vous êtes généreux. Je serai toujours votre reconnaissante amie ; mais cherchez ailleurs une femme, vous aurez peu de peine à en trouver une plus digne que moi.