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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/149

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LA FEMME DU DOCTEUR

bre de côtés romanesques ; mais, cependant, quelques-uns. George serait le dévouement même et l’adorerait toujours, cela va sans dire. Elle releva la tête à l’idée que, au pis aller, elle pouvait le traiter comme Édith traitait Dombey, et prendre du plaisir de cette façon, bien qu’elle ne fût pas très-certaine que la manière de faire d’Édith Dombey pût marcher sans la robe de velours, le diadème enrichi de diamants, et autres accessoires du rôle.

En attendant, Mlle Sleaford accomplissait ses devoirs le mieux qu’elle pouvait, et elle instruisait les orphelines selon sa manière nuageuse : elle s’arrêtait au milieu du passé indéfini d’un verbe quelconque pour leur promettre qu’elle viendrait passer une journée avec elles lorsqu’elle serait mariée et elle négligeait leur doigté de l’ouverture de Masaniello, pendant qu’elle réfléchissait à la couleur de sa robe de noce.

Et, pendant ce temps, combien pensait-elle à George ? À peu près autant qu’elle aurait pensé aux pages destinés à porter le fardeau splendide de ses robes à queue, si elle avait dû être couronnée reine d’Angleterre. C’était le futur, le mari ; personnage secondaire dans la pièce dont elle était l’héroïne.

La première lettre d’amour du pauvre George lui arriva le lendemain. C’était une épître vague et diffuse, pleine de craintes et de doutes nuageux, hantée, pour tout dire, par le fantôme du pauvre Joë Tillet, et sans aucune espèce de ponctuation :

« Chère Isabel Isabel à jamais chérie car je vous aimerai aussi longtemps que je vivrai si vous me repoussez je m’en irai en Amérique car le séjour de Graybridge me serait plus qu’odieux sans vous oh