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LA FEMME DU DOCTEUR

— Qu’appelles-tu une histoire à combinaisons ? — demanda innocemment Gilbert.

— Voilà. Lorsqu’on donne au public quatre romans simultanés qui doivent abonder en aventures multiples, il est impossible de vivre sur son propre fonds autant que l’honneur le voudrait, et le seul moyen à employer lorsque les idées nous manquent est de prendre les idées des autres d’une manière impartiale. On ne dévalise pas les poches d’un homme, mais on fait de légers emprunts à la ronde. Les romans à combinaisons permettent à un jeune auteur de présenter à son public les plus belles fleurs de la fiction gracieusement arrangées en guirlandes multicolores. En ce moment, j’écris une de ces histoires à combinaisons : la Prison d’Édimbourg et le Juif Errant. Tu ne te figures pas avec quelle perfection les deux récits se mêlent. D’abord, je reporte l’action au moyen âge. Il n’y a rien qui vaille le moyen âge pour se tirer des embarras d’une histoire. Qu’y a-t-il d’impossible à l’époque des Plantagenets ? Je fais de Jeannie Deans une fille muette, — l’intérêt est doublé lorsque l’héroïne est muette, — et je lui donne une chèvre et un tambour de basque, parce que c’est une chose qui plaît à l’artiste pour ses illustrations. Tu admettras, je pense, que j’ai certainement perfectionné Walter Scott, éminent écrivain, je le reconnais, mais qui ne réussirait nullement dans les journaux à un sou. Tiens, George, si tu jetais un coup d’œil sur l’histoire, tu pourrais juger de l’ensemble, bien qu’il n’y ait encore que soixante-dix-huit numéros parus. Naturellement, je ne fais pas aller Aureola, — j’appelle ma Jeannie Aureoîa ; c’est un assez joli nom, n’est-ce pas ? et qui est entièrement de mon invention, — na-