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LA TRACE

sonnier, quoique positivement coupable, n’était ni moralement, ni légalement coupable.

« Parce que, messieurs les jurés, le prévenu est fou, et fou depuis déjà longtemps ; oui, fou, messieurs les jurés. Chaque action de sa vie, qu’a-t-elle été, si ce n’est un acte de folie ? Son enfance, sa jeunesse insouciante et extravagante, sa virilité dissipée et désordonnée, passée au milieu de compagnons dangereux et adonnés à l’ivrognerie. Que fut son retour ? Un acte prémédité pendant les souffrances d’un accès de delirium tremens, et prémédité longtemps avant l’arrivée à Slopperton de son riche oncle, comme je vais bientôt vous le prouver. Cette conduite était-elle autre chose que le repentir soudain d’un insensé ? À peine rétabli de sa terrible maladie, une maladie durant laquelle les personnes atteintes, on le sait, se livrent fréquemment aux plus terribles excès sur elles-mêmes et sur les êtres qui leur sont le plus chers, à peine rétabli de sa maladie, il se lance à pied, sans le sou, pour faire un voyage de plus de deux cents milles, et cela, messieurs, je tremble même en y pensant, c’est par cette cruelle température de novembre qu’il accomplit ce long et pénible voyage, et que, le huitième jour après son départ de Londres, il vient tomber aux pieds de sa mère. Je vous prouverai, messieurs, que le prisonnier quitta Londres le jour même où son oncle arrivait à Slopperton ; il est