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DU SERPENT.

vous pourriez croire que vous devenez fou. » Le vent reprend. Que dit-il encore quand il vient à travers le sombre passage et vous plonge un poignard dans le dos, juste entre les deux épaules, comme un lâche qu’il est ? Que vous dit-il ? Pourquoi vous souffle-t-il à l’oreille de penser à la petite fiole de laudanum que vous avez mise en haut la semaine dernière, le jour où vous aviez mal aux dents, et dont vous ne vous êtes pas servi ? Un jour brumeux, humide, venteux, un vilain jour de novembre enfin, un jour dangereux. Que Dieu nous garde de mauvaises pensées aujourd’hui, et qu’il nous épargne aussi les enquêtes de police la semaine prochaine. Qu’on nous serve un verre de liquide bien chaud et bien fort, et qu’on nous prépare quelque chose de bon pour souper ; enfin, tout ce qui peut nous aider à supporter un jour comme celui-ci ; car si les cordes du piano qu’on entend là-bas, — cet instrument construit d’après des principes mécaniques et par des mains mortelles, — éprouvent par ce temps humide une dépression, un ramollissement, comment savons-nous s’il n’y a pas dans cet autre instrument plus délicat et qui n’est pas construit d’après les principes de la mécanique, l’esprit humain, en un mot, comment savons-nous s’il ne se trouve pas un peu dérangé par ce vilain jour de novembre ?

Mais sans doute les mauvaises influences ne peuvent venir qu’aux hommes mauvais, et ce doit être