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LA TRACE

sur la figure du malade, et se réfléchissait sur la chevelure noire de la jeune fille, qui, assise par terre, avait gardé son ancienne position près du lit. Cette lumière qui tombait sur eux, et qui n’éclairait aucun autre objet dans cette grande pièce sombre, semblait les unir, comme si elle eût été envoyée du ciel et dire : « ils sont seuls dans le monde, et ne seront jamais séparés. »

« La magnifique lumière, fillette, dit le malade, et je m’étonne de ne m’être jamais mis en peine de la remarquer et de ne pas l’admirer plus que je ne l’ai fait. Mon Dieu, je l’ai vue bien souvent disparaître derrière la crête des terres labourées, comme si elle se fût creusé son propre tombeau, heureuse de s’y ensevelir, et je ne pensais pas plus à elle qu’à un bout de chandelle, mais elle me semble maintenant si superbe cette lumière, que je sens que je voudrais la revoir encore, mon amie.

— Et vous la reverrez, vous la reverrez encore, Jim. »

Elle attira la tête du malade sur son sein et écarta de son front moite ses cheveux rudes. Elle était mourante elle-même, de compassion pour lui, d’anxiété et de fatigue, mais elle parlait d’une voix encourageante, et n’avait pas versé une larme durant toute sa maladie.

« Avec l’aide de Dieu, mon bien-aimé Jim, vous vivrez pour voir de nombreux et brillants couchers