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LA TRACE

— Pauvre ami, dit Jabez avec compassion, sa tête bat malheureusement la campagne, ce soir.

— Vous croyez ? répondit le malade ; vous croyez que ma tête bat la campagne, mon garçon ? Espérons-le ; espérons que je n’y voie pas très-clair ce soir, car je ne voudrais pas avoir une mauvaise opinion de toi, ne serait-ce que pour l’amour de ma mère morte.

— Vous entendez, dit Jabez en appelant du regard le témoignage de la jeune fille, vous entendez comme il a le délire.

— Encore un instant, mon garçon, s’écria Jim avec une soudaine énergie, en posant sa main décharnée sur le bras de son frère, encore un instant. Je vais mourir bientôt ; et avant qu’il soit trop tard, j’ai une prière à vous faire ; je n’en ai pas tant à adresser à Dieu ni aux hommes, que je doive oublier celle-ci. Vous voyez cette pauvre petite ; nous nous sommes aimés, je ne sais pas depuis combien de temps, mais depuis l’époque où elle était un petit être gazouillant que je portais sur mes épaules ; et un de ces jours, quand les salaires auraient été meilleurs, le pain moins cher, et l’avenir plus riant, d’une manière ou d’une autre, pour de pauvres gens comme nous, nous devions nous marier ; mais maintenant tout est fini. Aie bon courage, fillette, et ne pâlis pas ainsi. Il vaut peut-être mieux que ce soit comme cela. Eh bien, comme je