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DU SERPENT.

— Un aventurier. Valérie de Cévennes la proie d’un aventurier ! Montrez-moi l’homme capable de la conquérir, sans une fortune et un rang égal au sien, et je vous dirai que vous avez trouvé la huitième merveille du monde. »

Les yeux de l’écouteur brillèrent d’un éclat étrange, et levant sa lorgnette, il regarda attentivement pendant quelques instants autour de la salle, puis fixement du côté de la loge voisine de celle occupée par la famille royale.

La beauté espagnole était, en vérité, une splendide créature ; une beauté aux formes superbes et au teint admirable, mais ayant un air de hauteur et de résolution dans tous les traits de son visage. Un homme de cinquante ans était assis à côté d’elle, et derrière son fauteuil se tenaient deux ou trois personnages, aux poitrines chamarrées de broderies et de décorations. Ils lui adressaient la parole, mais elle prêtait peu d’attention à leurs discours ; si elle répondait, c’était par un mot, ou par une inclinaison de sa tête altière, qu’elle ne daignait pas retourner de leur côté. Elle ne cessait de tenir les yeux fixés sur le rideau qui bientôt se leva. On représentait Robert le Diable ; le rôle de Robert était chanté par le grand artiste du jour, un jeune homme dont la magnifique voix et le beau visage avait fait fureur dans le monde musical. On racontait plusieurs versions sur son origine. Les uns di-