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LA TRACE

celle dont je suis le maître aujourd’hui. Il n’y a rien sur terre qui puisse s’opposer à ce que nous vivions en bonne intelligence ; et peut-être ce mariage, dont vous parlez avec tant d’amertume, pourrait-il être aussi heureux que beaucoup d’autres, si nous pouvions, en me supposant Asmodée et vous mon élève, regarder en ce moment à travers les toits de cette bonne ville de Paris. »

Je me demande si M. de Marolles avait raison ? Je me demande si ce sacrement trois fois saint institué par un pouvoir divin, pour la gloire et le bonheur de la terre, est jamais, par une chance quelconque, profané et changé en amère dérision, ou en un méchant mensonge. Si, par quelque hasard, ces mots sacrés servirent jamais, dans une heure sombre de l’âge de ce monde, à unir certains êtres, qui eussent été plus heureux séparés et étrangers l’un à l’autre, quoiqu’ils reposent dans le même tombeau ; ou si, en vérité, cette solennelle cérémonie n’a pas souvent uni certains êtres, avec une chaîne que le temps ne peut ni raccourcir ni allonger, et qui enfin, dans quelques esprits mal organisés, est tombée au niveau d’une farce pitoyable et usée.

C’était, peut-être, un semblable doute qui faisait hocher la tête massive de John Milton, quand il écrivait ce traité sous un dur nom grec, et essayait de dénouer avec l’encre et la plume le nœud formé avec sa langue, que des hommes sages avouent ne