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DE LADY AUDLEY

— Mais regardez donc vos vêtements, mon pauvre ami ? ne voyez-vous pas l’eau qui ruisselle des manches de votre habit ? Qu’y a-t-il donc sur terre qui puisse vous faire sortir par un semblable temps ?

— Je suis fatigué et j’éprouve le besoin d’aller me coucher ; ne me tourmentez pas.

— Voulez-vous prendre un peu d’eau chaude avec de l’eau-de-vie, George ? »

Robert Audley en parlant ainsi barrait le passage à son ami et cherchait à l’empêcher d’aller se coucher dans l’état où il se trouvait, mais George le repoussa violemment de côté et passa devant lui en allongeant le pas, et lui dit avec cette même voix rauque que Robert avait remarquée au château :

« Laissez-moi seul, Robert, et ne vous occupez pas de moi si vous pouvez. »

Robert suivit George à sa chambre à coucher, mais le jeune homme lui ferma la porte au nez ; aussi n’eut-il rien de mieux à faire que de laisser M. Talboys livré à lui-même, et calmer son humeur aussi bien qu’il le pourrait.

« Il s’est irrité parce que j’ai remarqué sa frayeur des éclairs, » pensa Robert en se retirant froidement pour se reposer, parfaitement indifférent au bruit du tonnerre qui semblait le secouer dans son lit, et à la lueur des éclairs se jouant capricieusement sur les rasoirs dans le nécessaire de toilette ouvert.

L’orage s’éloigna en grondant du paisible village d’Audley, et quand Robert se réveilla le lendemain matin, il put voir un brillant soleil et le coin d’un ciel sans nuages apparaître entre les rideaux blancs de la croisée de sa chambre à coucher.

C’était une de ces pures et délicieuses matinées qui succèdent quelquefois à un orage. Les oiseaux avaient des chants bruyants et joyeux, les blés jaunes se redressaient dans les vastes plaines et ondulaient fière-