Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/150

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
146
LES OISEAUX DE PROIE

que Diana commença à espérer un peu qu’un léger amendement était survenu dans la vie de son père et de Valentin depuis qu’une amélioration s’était produite dans sa position et dans celle de son protégé.

Les préoccupations de Mlle Paget, au sujet de son père, ne l’absorbaient pas. Le capitaine n’avait jamais dissimulé son indifférence pour son unique enfant ou paru la considérer autrement que comme un embarras et un fardeau. Il n’y a donc rien d’étonnant que Diana ne songeât pas à son père absent avec une tendresse excessive ou un grand désir de le revoir. Elle pensait souvent à lui, mais ses pensées étaient douloureuses et amères ; plus douloureuses encore lorsqu’elles se reportaient vers son compagnon, ce qui arrivait plus fréquemment.

Les leçons qu’avait reçues Diana ne sont pas de celles qui rendent une femme pure et parfaite. Il y a des épreuves qui apurent le cœur et élèvent l’esprit, mais il est fort douteux qu’une créature toute jeune et sans soutien puisse gagner à une familiarité constante avec le mensonge et la fourberie, avec les embarras d’argent honteux, les fausses démarches, et tout le cortège des misères qui accompagnait la triste vie de son père. À l’âge où l’intelligence s’ouvre, elle avait senti toute l’humiliation de ces choses, comme un enfant qui mangerait d’un pain qui ne sera pas payé ou dormirait dans un lit d’où d’un moment à l’autre il pourrait être chassé. Sous cette pernicieuse influence, le cœur de la fille du capitaine s’était endurci ; aucune autre influence contraire n’était venue la contre-balancer ! Personne de bon ne s’était rencontré sur sa route pour la soutenir. Elle n’avait jamais su ce que c’est que d’être aimée : pendant treize années de sa vie, les mots tendres, les regards