Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/271

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
267
LES OISEAUX DE PROIE

« Mais que peut venir faire le brave capitaine à Ullerton ? C’est une question que j’examinai en moi-même pendant que le train m’emmenait à Black Harbour.

« Sheldon m’a recommandé le plus strict secret, et j’ai été aussi muet que la tombe ; il est, par conséquent, presque impossible que le capitaine ait aucune idée de notre affaire. C’est bien l’homme du monde le plus capable de chercher à me supplanter, s’il avait le moindre vent de ce qui m’occupe, mais j’ai la conviction que cela n’est pas.

« Cependant l’annonce publiée par le Times sur la fortune des Haygarth a pu être lue par bien d’autres que par Sheldon. Si mon patron l’avait aussi remarquée et s’il était venu à Ullerton pour cette même affaire ?

« Cela est possible, mais ce n’est pas probable. Lorsque j’ai quitté le capitaine, il était engagé dans les affaires de Philippe Sheldon. Sans aucun doute, ce sont les affaires de Philippe Sheldon qui l’ont amené ici. Cette ville, qui semble l’abomination de la désolation à toute personne habituée à vivre à Londres ou à Paris, est néanmoins un centre commercial, et l’agent de change peut aussi bien mettre dedans les simples Ullertoniens que les enfants moins naïfs de la métropole.

« Ayant fait ces réflexions, je pris le parti de ne pas me tourmenter plus longtemps de l’apparition inattendue de mon bienfaiteur et ami.

« À Black Harbour, je trouvai une voiture publique qui me transporta à Spotswold. Cette voiture était si étroite et si basse que j’en eus des crampes dans les jambes et la tête toute meurtrie. Il faisait nuit noire lorsque la voiture me déposa, avec deux compagnons de voyage qui semblaient des campagnards, à Spots-