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NOTES.

tels que nous les donne le Lotus, et tels qu’on les retrouve dans les Sûtras simples du Divya avadâna : Alpâvâdhatâm pariprĭtchtchhaty alpâtag̃katâñtcha laghusthânatâñtcha (al. laghûtthânatântcha) yâtrâbalam̃ (al. yâtrâñtcha balañtcha) sukhasparçavihâratâñtcha (al. sukhañtchânavadyatâñtcha sparçavihâratâñtcha). Les termes placés entre parenthèses sont empruntés au Prâtihârya sûtra[1] ; c’est vers la fin seulement qu’ils introduisent quelque changement dans la formule. Je puis proposer maintenant, pour le texte de notre Lotus, une version plus littérale que celle que j’avais adoptée d’après le seul manuscrit de la Société asiatique : « Il souhaite à Bhagavat peu de peines et peu de douleurs, et une position facile ; il lui souhaite la force de la marche et l’habitude des contacts agréables. » Si l’on suit la version du Prâtihârya sûtra, il faudra traduire : « Il souhaite à Bhagavat peu de peines et peu de douleurs, et une exertion facile, et la marche, et la force, et le bonheur, et la considération, et l’habitude des contacts. » On voit sans peine qu’il s’agit ici presque exclusivement d’avantages physiques dont on souhaite que le Buddha soit en possession pour qu’il puisse se livrer plus librement à l’accomplissement de sa mission. C’est ce qu’on reconnaît de suite dans les deux premiers termes âvâdha et âtag̃ka, qui pour les Buddhistes, comme pour les Brâhmanes, signifient « peine et maladie. »

Le terme suivant n’est pas aussi clair, à cause de la double leçon que présentent les manuscrits. Suivant celle du Lotus, laghusthânatâ signifiera « l’avantage d’une situation facile, » soit qu’on désigne ainsi l’avantage de se tenir aisément debout, soit qu’on fasse allusion à ces longues et merveilleuses séances où, selon les Sûtras développés, Çâkyamuni restait un temps infini assis sans bouger dans la même position. La leçon du Prâtihârya sûtra donne ce sens, « l’avantage d’un effort facile, » ce qui est, je crois, la meilleure interprétation. Mais faut-il attacher une si grande valeur à cette différence d’orthographe, sthâna et utthâna ? ne doivent-elles pas rentrer l’une dans l’autre quant au sens ? Et alors s’il n’y a qu’une différence de forme, faudra-t-il attribuer cette différence à une variété de dialecte, comme quand on voit, dans le langage des édits de Piyadasi à Girnar, le mot usthâna, « effort, » conserver, selon la remarque de Lassen[2], la forme radicale plus fidèlement que le sanscrit utthâna ? Ces questions, toutes minutieuses qu’elles paraissent être, reçoivent cependant une certaine importance de leur rapport à une question plus générale, celle de la rédaction des livres primitifs et des livres remaniés, puisqu’il s’agit dans le Lotus de la bonne loi d’un Sûtra développé, et dans le Sûtra des miracles d’un Sûtra simple. Quant aux termes suivants, « la force de la marche » ou « la marche et la force, » la première version me paraît préférable ; ici la formule des Buddhistes du Sud semble donner l’avantage à la seconde version, puisqu’on n’y voit que balam, « la force ; » mais il n’y est pas question de yâtrâ, omission qui diminue la valeur de son témoignage. Je crois du reste que « la marche » ou « la force de la marche » fait allusion à la double nécessité où est Çâkyamuni, ainsi que tous les Religieux, de recueillir sa nourriture en mendiant, et de marcher de long en large sur la promenade des monastères. Je donne encore l’avantage à la leçon du Lotus sur celle du Prâtihârya, en ce qui touche les mots suivants, « et l’habitude des contacts agréables. » Outre que la leçon que je

  1. Divya avadâna, f. 78 a et 76 b.
  2. Indische Alterthumsk, t. II, p. 256, note 1.