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APPENDICE. — N° VIII.

faite, il n’en est pas moins positif qu’ils appartiennent également pour le fond, et bien souvent pour la forme, à toutes ces écoles, et qu’ainsi on peut les compter au nombre des anciennes croyances du Buddhisme.

Il ne me semble pas en être de même des images qu’un effort puéril de la superstition se figure voir sur l’empreinte fabuleuse du pied de Çâkyamuni ; ici il est indispensable de distinguer entre l’empreinte elle-même et les signes que l’on cherche à y reconnaître. De tout temps, en effet, l’empreinte du pied du dernier Buddha a passé, parmi ses adorateurs, pour un objet digne de respect. C’est une opinion déjà assez ancienne, que Çâkya avait laissé l’empreinte de ses pieds, même en des lieux où il est à peu près établi qu’il ne s’était jamais rendu, par exemple dans le pays d’Udyâna, où l’on révérait une image du pied du Buddha, dont la dimension, si A. Rémusat a bien reproduit le sens de Fa hian, variait-suivant la pensée de ceux qui la contemplaient[1]. Non loin de Djellalabad, dans une des chambres de Bahrabad, un officier anglais, le lieutenant Pigou, a découvert une plaque de marbre sur laquelle on reconnaît l’image de deux pieds sculptés en relief[2]. L’usage de présenter à l’adoration des fidèles l’empreinte de deux pieds paraît même plus ancien ou tout au moins plus ordinaire dans l’Inde que celui de n’en figurer qu’un seul. On le retrouve chez les Djâinas, qui vénèrent eux aussi la double représentation des pieds de, Gâutama, et qui lui consacrent des monuments dont i} serait bien possible que les Buddhistes, s’ils existaient encore dans l’Inde, voulussent à leur tour réclamer la possession première[3]. On retrouverait certainement d’autres images dans l’Hindostan, et surtout dans les temples hypogées des provinces occidentales ; mais sans insister davantage sur ce fait incontestable, que l’empreinte des pieds de Çâkyamuni a été l’objet d’un respect superstitieux, je me hâte de constater qu’aujourd’hui encore les Népalais honorent d’une manière spéciale l’image de ces deux pieds sacrés[4]. Ainsi, chez les Buddhistes du Népal, comme chez ceux de Ceylan, cette image passe pour quelque chose d’infiniment précieux : ce point ne peut faire l’objet d’un doute.

La divergence des deux écoles commence avec la question de savoir quels signes les Buddhistes ont cru devoir tracer sur l’empreinte du pied ou sur celle des deux pieds de Çâkyamuni. En ce qui concerne les Buddhistes du Nord, le seul signe que l’étude des monuments figurés nous autorise à reconnaître sur la plante des pieds des statues ou des images du Buddha, est le Tckakra, ou la roue. On en remarque en effet la trace sur les pieds d’un grand nombre de statues de Çâkyamuni découvertes dans le Bihar et dans les chambres hypogées de l’Ouest de l’Inde. Or, si la statue entière a pu être décorée de cette figure, on comprend sans peine que l’empreinte de ses pieds, envisagée isolément, ait dû en reproduire l’image : et c’est certainement de là que vient la place qu’elle occupe au milieu du Çrîpâda des Singhalais, Sur le marbre découvert près de Djellalabad-on ne trouve aucun signe ; seulement quatre fleurs de nymphæa sont disposées aux quatre coins

  1. Foe koue ki, p. 45 ; Lassen, Ind. Alterth. t. II, p. 267, note 3.
  2. On the Topes of Darounta and caves of Bahrabad, Journ. as. Soc. of Beng. t. X, Ire part. p. 382.
  3. Inscript. at temples of the Jaina sect, dans Transact. roy. as. Soc. of Great-Britain, t. I, p. 522.
  4. Hodgson, Notices of the lang. and relig. of the Bouddhas, dans Asiat. Res. t. XVI, p. 461.