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Page:Burnouf - Lotus de la bonne loi.djvu/691

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APPENDICE. — N° IX.

que le Buddha n’éprouve d’échec dans aucun des moyens qu’il emploie pour agir sur les autres. Enfin c’est encore d’une manière négative qu’est présentée l’absence des imperfections morales et intellectuelles qui est un des mérites du Buddha. On voit par là comment il se fait que ces conditions, envisagées d’une manière extérieure, et avec l’esprit de classification qui se remarque chez les Buddhistes, ont pu être désignées par un terme négatif, comme celui de âvêṇika, « non mêlé. »

En ce qui regarde le second point, c’est-à-dire la manière dont sont divisées et groupées les dix-huit conditions non mêlées, je remarque d’abord qu’elles débutent, par un groupe de qualités intellectuelles, la connaissance du passé, du présent et de l’avenir : il n’y a là en réalité qu’un seul terme qui est la science du Buddha, mais ce terme devient triple par la triple division de la durée à laquelle il s’applique également. Ici, on le voit, nous touchons aux prétentions surnaturelles du Buddhisme en ce qui tient à l’intelligence. De l’intelligence nous passons à l’action, mais de façon que les deux termes se trouvent enchaînés l’un à l’autre, puisque le Buddha n’accomplit aucun acte qui ne soit précédé de la connaissance qu’il a du passé, du présent et de l’avenir. La triple lumière que jettent sur les actions du Buddha ces trois connaissances nous donne trois sortes d’actions, qui jointes aux trois connaissances, forment un total de six conditions ou qualités. Avec ces six conditions il se trouve en mesure de ne rencontrer aucun obstacle dans les applications spéciales de son activité, au nombre de six, que la glose énumère, et qui toutes ont un caractère intellectuel, sauf la volonté ou le désir, laquelle cependant tient encore à l’intelligence par son fond, puisque la volonté ou le désir n’est mise en mouvement que par la connaissance préalable, si imparfaite qu’elle soit, de la chose qu’on veut. Ainsi, quand le Buddha veut quelque chose, quand il enseigne, quand il fait acte de force, quand il médite, quand il exerce sa sagesse, quand il s’affranchit du monde des six conditions d’une science irrésistible pour les trois divisions de la durée, et d’une action dirigée par cette science irrésistible, font disparaître de devant lui tous les obstacles qui pourraient s’opposer au succès des six actions que je viens de rappeler d’après le texte. En réunissant ces six derniers mérites aux six premiers, nous sommes mis en possession de douze attributs âvêṇikas.

Que doit-il maintenant résulter de l’avantage qu’a le Buddha de ne rencontrer devant lui aucune sorte d’obstacle ni à son intelligence ni à sa volonté ? Il en résulte qu’il n’a aucune des imperfections intellectuelles et morales qui sont le partage des hommes ordinaires dans leur lutte mutuelle. Sous le rapport moral (et ceci répond à la volonté), il n’a ni méchanceté ni violence ; sous le rapport intellectuel, il n’a ni ignorance, ni agitation d’esprit inutile, ni précipitation, ni négligence par inattention. Ce sont là les six défauts qu’il n’a pas ; et les six avantages qui en résultent pour lui constituent six qualités ou conditions nouvelles, mais découlant nécessairement des précédentes, et qui parachèvent le nombre des dix-huit dharmas dits âvêṇika. Je le répète, c’est parce que ces qualités sont présentées négativement, c’est-à-dire comme l’absence des défauts qu’elles excluent, qu’on les a, si je ne me trompe, nommées âvêṇika, « non mêlées. « Mais si je n’avais pas le témoignage direct d’une glose originale, c’est-à-dire du texte de l’Abhidharmakôça