Page:Caro - George Sand, 1887.djvu/64

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la vive peinture des sentiments et des caractères. Comme on aime cette Consuelo, intelligence élevée, noble cœur, admirable artiste, dans les débuts chastement aventureux de sa vie errante à Venise, dans ses premiers triomphes et ses premières tristesses, à son arrivée à ce terrible château des Géants par une nuit de tempête, dans toute cette fantasmagorie des vieilles ruines et des grands souterrains, dans son amour pour le jeune comte Albert si longtemps combattu par l’effroi, dans sa fuite, dans sa rencontre à travers champs avec Haydn presque enfant, dans ce long voyage enfin, le plus ravissant et le plus fantastique que l’imagination puisse rêver !

Et plus tard, quand, aux prises avec des événements terribles, triste fiancée de la mort, sous le coup d’un effrayant mystère dont parfois sa raison se trouble, nous voyons reparaître Consuelo, vierge et veuve, comtesse de Rudolstadt, toujours grande et noble artiste, à la cour de Frédéric et dans la dangereuse intimité de la princesse Amélie, que de scènes pleines d’attrait et de terreur ! Sa prison, son enlèvement, cette fuite nouvelle sous la conduite des Invisibles, ces émotions douloureuses d’une passion énigmatique qui l’attire comme un amour permis et qui l’effraye comme une sorte d’adultère envers un mort, tout cela est raconté avec un intérêt, un entrain incomparables. Mais, pour Dieu ! que le comte Albert ne soit donc pas si fatal, si prolixe et si nuageux ! S’il aime Consuelo, qu’il lui parle de son amour et qu’il ne lui commente pas sans fin, dans une histoire