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monuments historiques.

fois se prévaloir de leur témoignage ; tout ce qu’ils racontent du roi d’Égypte Protée ne sort point en effet de la vraisemblance historique ; mais il n’en est pas ainsi du peu de lignes dans lesquelles Diodore de Sicile parle du même Pharaon, nommé, selon lui, en langue égyptienne ΚΕΤΗΣ[1], et Πρωτεὺς en langue grecque. Ce roi, suivant les traditions des Grecs qui, dit l’historien, sont d’accord avec celles des prêtres égyptiens, possédait à fond la science des vents, et avait le don de se transformer en toutes sortes d’animaux, en arbre et même en feu dévorant. Mais ces fables sur le souverain de l’Égypte contemporain de la prise de Troye, n’ont été évidemment inventées chez les Grecs qu’à propos du voyage de Ménélas en Égypte, raconté au 4e livre de l’Odyssée, voyage durant lequel l’Atride lutte avec le Dieu marin Protée, pasteur de Neptune, établi dans l’île de Pharos, où Ménélas obtint enfin de Protée des vents favorables. Diodore eût pu s’épargner la peine de chercher dans les détails du costume des anciens Pharaons, une explication peu naturelle des prétendues métamorphoses du roi Protée, qu’on aura, postérieurement à Homère, confondu sans raison avec un roi d’Égypte. L’inimitable poète n’est point

  1. Livre I, p. 62. Les manuscrits offrent les variantes Κετηνα, Κετνα et Κετινα.