Page:Cloutier - Propos japonais.pdf/20

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passagers. Les bancs y sont placés sur le travers, mais serrés les uns contre les autres et peu confortables, surtout à cause de leur dossier trop raide. D’ailleurs, les wagons de 2ème et même ceux de 1ère ne sont guère plus confortables à ce point de vue ; c’est là le défaut commun à toutes les chaises et à tous les bancs faits au Japon. Ensuite, nulle part le rembourrage ne suffit à tromper la fatigue. À peu près tout l’avantage des wagons de 1ère et de 2ème sur ceux de 3ème, c’est que les bancs étant placés sur le long, on y est moins à l’étroit et moins gêné par la foule trop compacte. De plus, tout y est entretenu par les employés du train, avec plus de soin et de propreté. Enfin, un autre avantage, c’est que le petit nombre de passagers qui montent d’ordinaire dans les compartiments de 1ère ou de 2ème classe, nous permet de remarquer plus à loisir la diversité de nos compagnons de route.

Je note, par exemple, ce gros monsieur, vêtu à l’européenne, qui s’est installé, tout à l’heure, au bout du banc, dans le meilleur coin du compartiment : très rouge, très poussif, mais profil superbe, vraie médaille romaine à l’effigie de Vitellius. C’est un tôsé shinshi, ou, si l’on veut un up-to-date gentleman, comme on dirait en anglais : lunettes dorées, chaîne et montre dorées, qu’il tire de temps en temps en regardant l’heure d’un air souverain. Il porte aussi un beau jonc d’or au doigt et fume avec volupté des cigarettes de luxe, assis nonchalamment sur une riche couverture de laine, qu’il a eu soin d’étendre sur le banc, avant de s’installer définitivement.

En face de ce gros monsieur, un militaire, un officier de je ne sais quel grade, très propre, bien peigné, bien