Page:Cloutier - Propos japonais.pdf/223

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
197
IMPORTANCE DE LA CONVERSION DU JAPON

Ainsi, il ne faut donc pas se faire illusion sur la place qu’occupe actuellement le Japon en Orient : sans contredit, il y tient le premier rang, il y est à la tête ; et qui sait si un jour, fort prochain peut-être, il n’en sera pas la tête même. Sans doute, il ne possède pas, par tempérament, la supériorité intellectuelle du génie chinois ou du génie indien ; il n’est pas comme le Chinois ou l’Indou, philosophe, spéculatif, créateur ! Mais Rome, qui a surgi, grandi, dominé, grâce à la sagesse pratique de ses consuls, au talent de ses généraux et à la vaillance de ses soldats, Rome, qui a fait courber devant elle toutes les nations du monde alors connu, Rome enfin, qui s’est amassé des richesses colossales en pillant les plus belles provinces de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique, Rome, la grande Rome n’était-elle pas, elle aussi, au point de vue intellectuel, inférieure à la Grèce, terre par excellence des philosophes, des poètes et des artistes ?… Comme la Rome d’autrefois, le Japon, d’aujourd’hui possède le génie des conquêtes et du gouvernement. Sans doute aussi, sa population est moins considérable que celle de la Chine et de l’Inde ! Mais si haut que l’on remonte dans l’histoire, ne remarque-t-on pas que, par un étrange paradoxe, ce sont les plus petites nations qui ont fait les plus grandes conquêtes et qui se sont taillé les plus grands empires ? Ainsi en fut-il des Assyriens de Salmanasar, des Perses de Cyrus, des Macédoniens d’Alexandre, des Romains de la République, des Huns d’Attila, des Arabes de Mahomet, des Francs de Clovis ? De même, plus près de nous, c’est l’Espagne qui s’est conquis un royaume, sur lequel le soleil ne se couchait pas, c’est la petite Angleterre qui s’est créé l’immense