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PERTHARITE.

1545Ou s’il revient à soi, lui-même tout ravi
M’avouera le premier que je l’ai bien servi.


Scène II.

GRIMOALD, ÉDÜIGE, UNULPHE.
GRIMOALD.

Que voulez-vous enfin, Madame, que j’espère ?
Qu’ordonnez-vous de moi ?

ÉDÜIGE.

Qu’ordonnez-vous de moi ?Que fais-tu de mon frère ?
Qu’ordonnes-tu de lui ? prononce ton arrêt.

GRIMOALD.

1550Toujours d’un imposteur prendrez-vous l’intérêt ?

ÉDÜIGE.

Veux-tu suivre toujours le conseil tyrannique
D’un traître qui te livre à la haine publique ?

GRIMOALD.

Qu’en faveur de ce fourbe à tort vous m’accusez !
Je vous offre sa grâce, et vous la refusez.

ÉDÜIGE.

1555Cette offre est un supplice aux princes qu’on opprime :
Il ne faut point de grâce à qui se voit sans crime ;
Et tes yeux, malgré toi, ne te font que trop voir
Que c’est à lui d’en faire, et non d’en recevoir.
Ne t’obstine donc plus à t’aveugler toi-même :
1560Soit tel que je t’aimois, si tu veux que je t’aime ;
Sois tel que tu parus quand tu conquis Milan :
J’aime encore son vainqueur, mais non pas son tyran.
Rends-toi cette vertu pleine, haute, sincère,
Qui t’affermit si bien au trône de mon frère ;
1565Rends-lui du moins son nom, si tu me rends ton cœur.