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Page:Crépet - Les Poëtes français, t4, 1862.djvu/588

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Dans l’air léger flottait l’odeur des tamarins ;
       Sur les houles illuminées
Au large, les oiseaux, en d’immenses traînées,
       Plongeaient dans les brouillards marins.

Et, tandis que ton pied, sorti de la babouche,
       Pendait, rose, au bord du manchy,
À l’ombre des bois noirs touffus, et du Letchi
       Aux fruits moins pourprés que ta bouche ;

Tandis qu’un papillon, les deux ailes en fleur,
       Teinté d’azur et d’écarlate,
Se posait par instants sur ta peau délicate
       En y laissant de sa couleur ;

On voyait, au travers du rideau de batiste,
       Tes boucles dorer l’oreiller ;
Et, sous leurs cils mi-clos, feignant de sommeiller.
       Tes beaux yeux de sombre améthiste.

Tu t’en venais ainsi, par ces matins si doux,
       De la montagne à la grand’messe,
Dans ta grâce naïve et ta rose jeunesse
       Au pas rhythmé de tes Hindous.

Maintenant, dans le sable aride de nos grèves,
       Sous les chiendents, au bruit des mers.
Tu reposes parmi les morts qui me sont chers,
       Ô charme de mes premiers rêves !




LE SOMMEIL DU CONDOR


Par delà l’escalier des roides Cordillières,
Par delà les brouillards hantés des aigles noirs,
Plus haut que les sommets creusés en entonnoirs
Où bout le flux sanglant des laves familières ;