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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/139

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RECITS D AVENTURES 89

bien plus facilement. On vivait de leur vie, on s'exaltait dans leur force, on souffrait de leurs anxiétés, on triomphait de leurs victoires*. D'ailleurs ils étaient plus attachés que les dieux à leur lieu de naissance. Ceux-ci, par leur nature même, tendaient sans cesse à devenir les dieux de tout le monde ; les héros demeuraient toujours les représentants d'un certain groupe d'hommes. Ils n'avaient pas d'Olympe qui leur servît de domicile commun, ils ne formaient pas une famille. Leur terre natale restait leur lieu d'habitation naturel; ils appartenaient à leur peuple, et conservaient à jamais dans leur physionomie ses traits distinctifs. On les en aimait davantage et on s'intéressait d'autant plus à leurs aventures. Voilà pourquoi, après avoir figuré dans les hymnes des anciens temps, ils ne pouvaient manquer, à mesure que la poésie devenait plus libre et plus vivante, de grandir en importance.

Il est plus que probable que, dès la période achéenne, les héros furent groupés par la légende en des récits d'aventures communes. Ce groupe- ment ne nous paraît pas appartenir, comme on l'a dit, à une phase distincte de l'évolution légendaire*. Si certains héros, tels qu'Héraclès et Thésée, étaient ordinairement représentés comme isolés, ce n'était pas qu'ils eussent été conçus par la poésie dans un âge plus ancien ; cela tenait simplement à l'origine même et à la nature des traditions qui les concer- naient. La légende héroïque est libre, complexe et capricieuse ; elle a pu produire et elle a produit des récits de diverse sorte simultanément. Les guerres des tribus, leurs alliances, leurs entreprises com-

1. Consulter p.ir exemple à ce sujet Hérod., V, 67.

2. Bergk, Griech. Liler., t. I, p. 420.

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