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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/421

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AMIS ET ENNEMIS D'ULYSSE 371

tous les traits accusés qui conviennent le mieux à la grande poésie épique. On ne peut nier ni le succès partiel du poète, ni les défauts de son œuvre. Son Télémaque ne nous est pas indifférent : il y a en lui une sorte d'ingénuité fière qui nous attache, et en même temps un sentiment de sa faiblesse qui parfois le rend touchant. Mais avec cela, nous ne le com- prenons pas entièrement. On ne sait trop ce qu'il veut ni ce qu'il fittend de sa mère. Il y a même à cet égard de véritables contradictions dans le poème*. Qu'elles proviennent de surcharges plus ou moins récentes, cela se peut; mais ces surcharges mêmes auraient été impossibles si la conception première eut été plus nette. — A côté de Télémaque, il suf- fit de mentionner le vieux Laerte, dont il n'est ques- tion que dans la seconde partie du poème. Il ne pa- raît en personne qu'au vingt-quatrième chant. Tout son rôle est contenu dans une seule scène, bien touchante, celle de sa reconnaissance avec Ulysse. Elle a le tort peut-être de renouveler un genre d'émotion que les récits antérieurs ont à peu près épuisé. Mais isolée de ce qui précède, elle échappe à cet inconvénient, et elle garde le charme éternel de tout ce qui est vrai et profond.

Toutefois, parmi les auxiliaires d'Ulysse, celui qui tient le premier rang, ce n'est ni son père Laerte, ni même son fils Télémaque, c'est l'excellent ser- viteur que Fénelon appelait gracieusement a le bonhomme Eumée »'. Si l'on admet que la création

��1. Comparer notamment, XIX, 530, avec l'ensemble du carac* tère. Nulle part, dans VOdysséCy Télémaque ne joue auprès de sa mère le rôle indiqué par ces vers.

2. Fénelon, Lettre à VAcad.y art. V. « Cette simplicité de mœurs semble ramener rage d'or. Le bonhomme Eumée me touche bien

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