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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/107

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HÉGÉSIAS DE MAGNÉSIE

d’état, dans des débats imaginaires[1]. Cela valait mieux, sans doute, que de composer, comme les anciens sophistes, l’éloge du « moucheron » ou celui de « Busiris ». Mais ces harangues n’en étaient pas moins des exercices d’école assez creux, et que l’oubli toujours croissant de la réalité devait faire verser de plus en plus dans le bel esprit et dans le mauvais gout. Denys d’Halicarnasse est très sévère pour toute cette rhétorique[2]. Il la traite d’« imbécile » et de « barbare ». Nous ne pouvons plus en juger avec assurance : elle a péri presque tout entière. Il est pourtant probable qu’il avait raison au fond, et que ses vivacités de langage, dont l’excès sent la polémique, n’étaient pas tout-à-fait imméritées.

Une douzaine de noms de rhéteurs appartenant au iiie et au iie siècle sont arrivés jusqu’à nous[3]. Le plus connu, le seul peut-être qui mérite un bref souvenir, est Hégésias de Magnésie, qui vivait vers le milieu du iiie siècle[4]. C’etait un polygraphe, qui avait composé, outre ses œuvres oratoires, au moins un écrit historique : une histoire d’Alexandre le Grand[5]. Ce qui fait que le nom d’Hégésias mérite de survivre plus peut-être que quelques autres, ce n’est ni l’intérêt de ses œuvres, aujourd’hui perdues, ni son talent, car il est malmené par les critiques anciens les plus autorisés ; — mais c’est son influence. Il est en effet le représentant prin-

  1. Quintilien, II, 4, 41.
  2. Denys d’Halic., Préface de ses Jugements des orateurs anciens. Voir aussi Cicéron, dans le Brutus.
  3. Cf. Susemihl, II, p. 462 et suiv.. — Citons seulement, pour mémoire, Matris de Thèbes, dont l’Éloge d’Héraclès a été la principale source des récits de Diodore, I, 24, 4.
  4. Il était postérieur à Charisios, dont il suivait les exemples (Cicéron, Brutus, 83), et antérieur à l’école de Pergame, qui réagit contre son influence.
  5. Plutarque, Alex., 3. — Les fragments d’Hégésias ont été recueillis par C. Müller à la suite de son Arrien (Bibl. Didot), dans les Fragments des historiens d’Alexandre, p. 138-144.