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CHAPITRE IV. — LA POÉSIE ALEXANDRINE

d’hymnes, sont séparés les uns des autres à la fois par leurs dates et par les occasions qui les ont fait naître. La différence des dates, à vrai dire, a peu d’importance littéraire dans ce cas particulier : l’art très savant de Callimaque est toujours le même ; il est aussi sûr de son instrument à trente ans qu’à cinquante, et aucune trace d’affaiblissement n’apparaît. La nature des occasions a plus d’importance. Certains de ces poèmes, comme l’hymne élégiaque à Pallas, semblent destinés à former la pièce centrale, pour ainsi dire, d’une fête religieuse, et évoquent le souvenir des « nomes ». D’autres sont plutôt peut-être des « proèmes », des morceaux d’ouverture pour une fête religieuse, comme beaucoup d’hymnes homériques. D’autres enfin semblent destinés à ces concours poétiques et musicaux qui accompagnaient les fêtes. De là, très probablement, le tour un peu plus lyrique de quelques-uns, le ton plus épique et narratif de quelques autres. De là, peut-être, dans l’Hymne à Pallas et dans un ou deux autres, les traces qu’on croit apercevoir de la vieille composition nomique[1]. Ces différences sont pourtant secondaires. Si la composition nomique (au point de vue littéraire, et non musical) est réellement quelque chose, elle est si semblable à la composition de tout poème lyrique grec en général que les critiques qui s’adonnent à sa recherche n’arrivent jamais à s’entendre entre eux sur sa nature propre. Et quant au plus ou moins de lyrisme dans le style, ce n’est jamais qu’une différence de degré. Les traits communs, au contraire, sont essentiels et caractéristiques.

Ce qui remplit tous ces hymnes, c’est la religion, c’est-à-dire l’éloge des dieux et le récit de leurs légendes. Mais combien cette religion est différente de celle d’un Eschyle ou même d’un Pindare ! Callimaque est

  1. Bergk, Gr. liter., II, p. 212 et 218. Cf. Kaisebier, De Callimacho νόμων poeta (prog.), Brandebourg, 1873.