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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/366

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CHAPITRE II. — D’AUGUSTE À DOMITIEN

de Polybe et de Posidonios. Beaucoup de ces auteurs semblent avoir été suivis par lui pas à pas, le plus souvent abrégés, quelquefois copiés, ou peu s’en faut. Jamais, il ne s’est avisé de remonter au delà, de les contrôler par les monuments, les archives, les inscriptions, ou simplement par un sens ferme de la probabilité. D’un bout à l’autre, sa bibliothèque est donc, non seulement un ouvrage de seconde main, mais presque une série d’extraits, légèrement arrangés. Il est vrai que ce manque même d’originalité lui donne en un certain sens une valeur spéciale, puisqu’elle nous a ainsi conservé une sorte de reproduction de beaucoup d’ouvrages perdus.

Cette manière de faire suffit à dénoter une médiocrité d’esprit, qui apparaît plus vivement encore dans le travail proprement littéraire. Enchaîné à ses auteurs, Diodore n’a pas même su suivre le plan qu’il s’était tracé à lui-même. Après avoir répudié, comme on l’a vu, la méthode annalistique, qui morcelle le récit par années, il y revient dans une grande partie de son exposé. Comment en serait-il autrement ? Les vues générales qui lui auraient seules permis de constituer dans l’histoire universelle des groupes de faits vraiment homogènes, il ne les a pas. Nulle idée du progrès ou de la décadence des peuples, des causes qui les ont mis en contact les uns avec les autres, des emprunts qu’ils ont pu se faire mutuellement, ni de la marche de la civilisation. La constitution des grands empires, le développement de la puissance romaine, en un mot les faits dominants qui englobaient tous les autres, ne semblent pas l’avoir frappé. Il n’a point de philosophie. Il est vrai qu’il voit partout l’action de la providence ; mais cette action, telle qu’il la conçoit, se réduit à une puérile distribution de récompenses et de peines. Du reste, il n’est ni homme d’État, ni homme de guerre. Même l’histoire des