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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/584

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CHAP. IV. — SOPHISTIQUE SOUS LES ANTONINS

agréable et parfois à demi plaisante ; c’était en quelque sorte un lever de rideau, la petite pièce avant la tragédie. En raison de ce caractère, on les appelait aussi causeries (παλιαί, προλαλίαι), noms qui furent ensuite appliqués par extension à d’autres genres de discours.

Mais si la διάλεξις n’était pour les rhéteurs qu’un prélude, elle était tout pour les philosophes qui enseignaient à la façon des sophistes. Eux n’inventaient pas de causes fictives, ils ne jouaient pas les Xerxès ni les Thémistocle ; ils venaient traiter devant le même public des sujets de morale. Leurs discours, appelés διαλέξεις, étaient proprement ce que nous nommons des Conférences. Le recueil de Dion Chrysostome, dont nous avons parlé plus haut, celui de Maxime de Tyr, sur lequel nous reviendrons plus loin, peuvent donner une idée assez complète du genre en lui-même et des variétés qu’il comportait. Pour quelques philosophes beaux esprits, dont Maxime de Tyr peut être considéré comme le type, la philosophie n’était guère qu’un prétexte, et leur auditoire ne différait pas sensiblement de ceux des sophistes. Déjà, au siècle précédent, le stoïcien Musonius en connaissait de tels, et Aulu-Gelle nous a conservé la vive critique qu’il faisait d’eux. « Lorsqu’un philosophe, disait-il, exhorte, convertit, conseille, réprimande, ou en général donne un enseignement quelconque, si ses auditeurs lui prodiguent, d’un cœur léger et libre, des louanges banales, si même ils poussent des cris, s’agitent comme transportés, si les grâces de sa voix et les modulations de ses phrases les émeuvent et les mettent hors d’eux-mêmes, sachez que celui qui parle et ceux qui écoutent perdent également leur temps ; ce n’est pas un philosophe qui parle, c’est un joueur de flûte qui se fait entendre[1]. »

  1. Aulu-Gelle, V, 1.