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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/604

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CHAP. IV. — SOPHISTIQUE SOUS LES ANTONINS

où il raconte à grands traits l’histoire de ses débuts, il est à croire qu’il y tenait peu et n’en tira point vanité[1]. Non pas qu’il dût être mauvais avocat : il avait l’esprit ingénieux, subtil et clair à la fois, très inventif et raisonneur. Mais la nature lui avait refusé le goût des affaires. Il était fantaisiste, moqueur, artiste, aimait à se jouer des choses, à créer librement et légèrement. Que faire de tout cela au barreau ? Il s’échappa : la vie de sophiste voyageur convenait bien mieux à son tempérament. Ce fut en cette qualité qu’il parcourut le monde romain. Il donna des séances oratoires en Asie Mineure, en Grèce, en Macédoine, en Italie, en Gaule[2] ; là, même, il tenta un établissement, et obtint d’une ville, — probablement d’une des cités demi-grecques de la vallée du Rhône, — une chaire municipale de rhétorique avec de gros appointements[3]. Mais ces avantages ne le retinrent pas fort longtemps : il était trop grec désormais pour vivre longtemps loin de la Grèce.

Vers le début du règne de Marc-Aurèle, entre 161 et 165, nous le retrouvons en Orient ; il est en Ionie, puis à Antioche, en 163, lorsque l’empereur Verus y vient pour diriger la guerre contre les Parthes[4] ; il retourne sans doute alors à Samosate[5] ; puis, il prend son parti

  1. Double accus., 27.
  2. Double accus., 27 : Καὶ τὰ μὲν ἐπὶ τῆς Ἑλλάδος καὶ τῆς Ἰωνίας μέτρια ἐς δὲ τὴν Ἰταλίαν ἀποδημῆσαι θελήσαντι αὐτῷ τὸν Ἰόνιον συνδιέπλευσα καὶ τὰ τελευταῖα μέχρι τῆς Κελτικῆς συναπάρασα εὐπορεῖσθαι ἐποίησα.
  3. Apologie pour les salariés, 15, adressée à Sabinus : ὃν (moi que) πρὸ πολλοῦ ᾔδεις ἐπὶ ῥητρορικῇ δημοσίᾳ μεγίστας μισθοφορὰς ἐνεγκάμενον, ὁπότε κατὰ θέαν τοῦ ἐσπερίου ὠκεανοῦ καὶ τὴν Κελτικὴν ἅμα ἐπιὼν ἐνέτυχες ἡμῖν τοῖς μεγαλομίσθοις τῶν σοφιστῶν ἐναριθμουμένοις.
  4. Cela est prouvé par les allusions contenues dans les Portraits, la Défense des Portraits et le traité sur la Manière d’écrire l’histoire. Voir M. Croiset, Observations sur deux dialogues de Lucien (Ann. de l’assoc. pour l’encouragement des Études gr., 1879).
  5. Songe, 18.