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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/611

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LUCIEN ; SES ÉCRITS

et le Toxaris, si ces trois compositions sont vraiment de Lucien. Dans le premier, l’auteur défend l’art de la pantomime contre les condamnations ou les préjugés des moralistes, ce qui l’amène à nous donner sur cet art quantité de renseignements intéressants. L’Anacharsis se rapporte à la question du rôle et de l’utilité de la gymnastique. Le Toxaris est surtout un recueil de traits d’amitié, agréablement contés. — Mais c’est à partir de l’Hermotime, composé par Lucien à quarante ans[1], probablement en 166, qu’il est vraiment lui-même. Son parti est pris en matière de philosophie : il repousse le dogmatisme métaphysique, pour s’en tenir au sens commun et à un scepticisme mitigé. Dans la Double accusation, qui est à peu près du même temps[2], il déclare hautement sa rupture avec la rhétorique, art de mensonge et de coquetteries puériles, indigne d’un homme sérieux, et il définit le dialogue satirique, dans lequel il débute avec éclat. La jolie scène intitulée les Sectes à l’encan semble lui avoir valu en ce genre un succès particulier, non sans quelque scandale. Ce scandale fait justement le sujet du Pêcheur ; véritable profession de foi philosophique et satirique, où il se déclare investi par la philosophie elle-même de la mission de démasquer toutes les impostures. Très certainement, ces quatre compositions ont dû se suivre à fort peu d’intervalle.

Autour d’elles, se groupent tous les dialogues satiriques ; quelques-uns, peut-être antérieurs, mais de peu, à ces manifestes retentissants ; la plupart, ou contemporains, ou écrits sans interruption dans les années immédiatement suivantes. En général, la satire morale y est mêlée à la raillerie des mythes et des croyances ; toutefois, en proportion inégale. La morale prédomine dans

  1. Hermot., c. 44.
  2. Double accus., c. 32 : Ἀνδρὶ ἤδη τετταράκοντα ἔτη σχεδὸν γεγονότι.