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Page:D’Alembert - Œuvres complètes, éd. Belin, I.djvu/274

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ÉLÉMENS

rale du philosophe termine en même temps la partie de la philosophie qui doit nous intéresser le plus, et qui contient l’art de raisonner, la connaissance de l’Être suprême, celle de nous-mêmes et de nos devoirs.

Nous sera-t-il permis de conclure ces élémens de morale par un souhait que l’amour du bien public nous inspire, et dont il serait à désirer qu’un citoyen philosophe jugeât l’exécution digne de lui ? Ce serait celle d’un catéchisme de morale à l’usage et à la portée des enfans. Peut-être n’y aurait-il pas de moyen plus efficace de multiplier dans la société les hommes vertueux ; on apprendrait de bonne heure à l’être par principes ; et l’on sait quelle est sur notre âme la force des vérités qu’on y a gravées dès l’enfance. Il ne s’agirait point dans cet ouvrage de raffiner et de discourir sur les notions qui servent de base à la morale ; on en trouverait les maximes dans le cœur même des enfans, dans ce cœur où les passions et l’intérêt n’ont point encore obscurci la lumière naturelle. C’est peut-être à cet âge que le sentiment du juste et de l’injuste est le plus vif ; et quel avantage n’y aurait-il pas à le développer et à l’exercer de bonne heure ? Mais un catéchisme de morale ne devrait pas se borner à nous instruire de ce que nous devons aux autres. Il devrait insister aussi sur ce que nous nous devons à nous-mêmes ; nous inspirer les règles de conduite qui peuvent contribuer à nous rendre heureux ; nous apprendre à aimer nos semblables et à les craindre, à mériter leur estime et à nous consoler de ne la pas obtenir, enfin à trouver en nous la récompense des sentimens honnêtes et des actions vertueuses. Un des points les plus importans, et en même temps les plus difficiles de l’éducation, est de faire connaître aux enfans jusqu’à quel degré ils doivent être sensibles à l’opinion des hommes ; trop d’indifférence peut en faire des scélérats ; trop de sensibilité peut en faire des malheureux.

XIII. GRAMMAIRE.

Avant que de finir la première partie de cet essai, qui renferme les sciences les plus nécessaires à l’homme, la logique, la métaphysique et la morale, nous ne devons pas omettre une réflexion très-importante. Quoique nous ayons séparé ces différentes sciences, pour les envisager chacune plus particulièrement, eu égard à la nature et à la différence de leur objet, elles sont cependant plus unies entre elles et ont plus d’influence réciproque qu’on ne s’imagine ; et par cette raison l’ordre le plus philosophique qu’on puisse suivre pour les bien traiter, est peut-être moins de les traiter séparément, que de les faire marcher