Page:Darboy - Œuvres de saint Denys l’Aréopagite.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
clvii
INTRODUCTION.

Amen ! et les échos de l’éternité répéteront sans fin : Amen ![1].

Ces analogies entre la scholastique et saint Denys furent constatées par quelques historiens de la philosophie ; mais comme ils ne se sont exprimés qu’en de courtes paroles, et comme, en outre, ils ne se proposaient pas de signaler ce fait à la gloire de saint Denys, leur aveu n’a pas eu, sous le rapport qui nous occupe, la portée qu’il mérite ; et par suite notre sentiment pourrait sembler contestable et paradoxal. C’est facile pourtant d’en établir la vérité, et même l’évidence. Il faut croire en effet que ce point d’histoire fait saillie, et brille d’une éclatante lumière sur le fond obscur des événements anciens, puisque le peintre habile, qui, dans un cadre étroit, groupe les accidents variés d’une période de sept siècles, donne place à l’idée que nous exposons. « Scot Érigène savait le grec, et il a traduit Denys l’Aréopagite, et comme Denys l’Aréopagite est un écrivain mystique, qui contient à peu près le mysticisme alexandrin, Scot Érigène avait puisé dans son commerce une foule d’idées alexandrines qu’il a développées dans ses deux ouvrages originaux, l’un sur la prédestination et la grâce, l’autre sur la division des êtres. Ces idées, par leur analogie avec celles de saint Augustin, entrèrent facilement dans la circulation, et grossirent le trésor de la scholastique[2]. » En un mot, le résultat acquis des recherches modernes, c’est que les œuvres de saint Denys sont la source de la philosophie d’Érigène, et que des œuvres d’Érigène sort la philosophie du moyen âge et par suite la science moderne[3].

Au reste, pour résoudre à l’avance les objections possibles, et donner la mesure de nos assertions, il serait utile de faire quelques remarques. 1o Les tendances que

  1. Anselm. Meditat. ; Lombard. Sent., lib. IV ; D. Thom., part. 3, supplem.
  2. Cousin, Hist. de la Phil., 9e leçon.
  3. Staudenmeyer, Scot Érigène, et la science de son temps ; de Gérando, Hist. comparée, t. IV, ch. 22 et suiv.