Aller au contenu

Page:Darboy - Œuvres de saint Denys l’Aréopagite.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XLVII
INTRODUCTION.

vine déborde avec tant de richesse et d’éclat, ait voulu ternir la pureté de sa conscience par l’hypocrisie. Quelle gloire y a-t-il donc devant Dieu et devant le monde, quel avantage pour cette vie et pour l’autre dans une lâche imposture ? Quelle fascination peut exercer sur un cœur droit le hideux plaisir de tromper ? J’en demande pardon à ces illustres saints ; mais conçoit-on que les Basile, les Chrysostome, les Augustin, à côté des solennels enseignements de la foi, à la suite d’un énergique cri d’amour, nous racontent du même style et avec le même accent des faussetés insignes ? Cette induction, légitime et concluante à leur égard, ne l’est pas moins à l’égard de notre auteur. La piété, mère de la véracité, respire dans ses écrits ; il n’est donc ni juste, ni possible de penser qu’il ait sacrifié au mensonge.

Qu’on y fasse attention ; si l’on repousse notre sentiment, il faut embrasser ces suppositions gratuites, étranges, il serait permis de dire, absurdes. Car il ne suffit pas d’alléguer contre nous quelques faibles difficultés plus ou moins fondées sur un texte dont l’authenticité se prête également aux conclusions de la saine critique et aux insinuations de la mauvaise foi ; on doit encore émettre une opinion où tout se tienne, et qui ne croule pas sous le poids de sa propre invraisemblance. Or, on avouera que nos adversaires font de leur prétendu saint Denys un personnage monstrueux, zélé pour la vérité et pour le mensonge, pieux et hypocrite, intelligent et stupide, manière de sphinx placé au seuil de l’histoire ecclésiastique, uniquement pour préparer des tortures aux Saumaises à venir ; car personne n’a pu dire encore dans quel but il se serait enveloppé d’énigmes, pourquoi il aurait fait de son nom un problème. Par là ils abolissent les lois morales qui gouvernent les esprits ; ou s’ils en reconnaissent l’existence, du moins ils en rendent toute application impossible : car si cet écrivain a menti, alors un homme d’intelligence peut agir sans motif, un homme de cœur peut être fourbe ; ou si cet écrivain n’a ni intelligence ni cœur,