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dieux jaloux, et pourvu qu’ils aient le titre de la prière et la bénédiction initiale, ils abandonnent facilement le reste à des étrangers ; s’ils ne sont pas les héros du yast, ils en sont les titulaires et le fidèle peut être en paix avec sa conscience^^1.

Mais ces trois lignes mêmes consacrées à Haurvatât n’ont rien qui s’applique à lui plus particulièrement qu’à Ameretât ; elles s’appliquent au dieu de l’Abondance quel qu’il soit, on pourrait y substituer Ameretât à Haurvatât sans que rien avertît du changement et il est probable que le yast perdu d’Ameretât ne différait de celui-ci, au moins dans la formule d’introduction, que par le nom du titulaire. Voici cette formule :

Mrao^ ahurô mazdâo çpitamâi zarathustrâi azem dadhâm haurvatâtô naràm ashaonâm avâoçca rafnâoçca baoshnâocça qîtâoçca.

Ahura Mazda dit au très-saint Zoroastre : c’est moi qui, pour les hommes purs, ai créé les secours, les plaisirs, les jouissances et les biens de Haurvatât^^2.

Dans ce passage Haurvatât n’est plus le génie particulier des

1. Dans le Yast consacré à Zemyàd, génie de la terre, ce génie n’est pas cité une seule fois.

2. M. Spiegel traduit : ces joies, puretés, propriétés de fîaurvaf (dièse Erfreuungen, Remheiten^ Eigenthijmlichkeiten des flaurvaO. H nie semble difficile de voir un démonstratif dans avâoç ; les deux mots avàoçca rafnâoçca rappellent forcément le dvandva avaçca rafnaçca (Yç. 57, 20 ; yt. 10, 5 ; 13, 1). Je rapporte haoshnâoç à la racine hhug jouir (à laquelle il faut peut-être rapporter aussi, malgré la tradition, le mot pouru-baokhshnahê^ Yç. 9^ 84). Je doute qu’on puisse rapprocher qîtâoçca de qaêtu et qaêti, où qaê n’est point le gu ?îa d’une racme qi (cf. le sanscrit svay-âm.) ; je le décompose en hu-îtâo et l’assimile au védique su-vita ;= *su-ita (v. Benfey, glossaire au Sàma Vôda s. v.) ; quant à la désinence, cf. les accusatifs neutres comme rac^rdofca. Cette étymologie substitue un sens précis au sens vague (de soi-même) donné au mot qîti dans cette ligne du x*’ Yast, 68 : (Mithrahé) daèna mazdayaçnis qîlipûthô râdhaiti : (Mithrae) lex mazdayaçnis ad bene eundum vias munit : à Mithra la loi mazdayaçnienne fraie des routes faciles {qîti = *su-îti est à l’instrumental ; mot à mot : avec bonne marche). Ainsi interprétée, cette expression qîti pathô râdhaiti se trouve reproduite mot pour mot dans cet hémistiche védique : palho radantî suvitâya (devi) : vias muniens ad bene eundum (dea) : RV. 5, 80, 3 ; cf. 1. 90, 4. Reste l’énigmatique qilica éneitî Yç. 30, 11, traduit par Nériosengh ahhilâshukaçca çixâyâh ; peut-être çixâ estil la traduction de ç{<i (bonne voie, bonne direction). — Citons la traduction d’Anquetil : J’ai donné Khordad aux hommes purs pour qu’il leur procure les plaisirs, qu’il les bénisse, qu’il leur donne continuellement les biens et l’abondance.