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le p’tit gars du colon

péniblement souleva cette main… le bras…

Oh ! comme elle était sans force, sa pauvre maman ! Il l’aida à porter le crucifix jusqu’à ses lèvres pâles ; cela lui fendit le cœur… Sa mère lui souffla :

— Embrasse Jésus.

L’enfant posa son meilleur baiser sur le Christ en croix, vénéré par sa mère mourante. Mais qu’elle se mourait, il n’en savait toujours rien.

Et la voix qui parlait tout bas, avec un sifflement douloureux, dit au petit : « Aime… toujours… aime… Jésus… et ton papa… »

— Oui, oui, j’aimerai Jésus, et mon papa… et ma petite maman chérie.

Il embrassa la pauvre femme étendue, muette, blême, les yeux clos. Il l’embrassa, la retenant de ses deux bras, si fort… que la garde le fit s’éloigner :

— Tu fais mal à ta mère.

Et comme il quittait le lit funèbre, le lampion s’est éteint. Il fait tout noir dehors, et tout noir dans la chambre humide. Un long cri d’apeurement hulule vers le bois : le hibou se lamente sous la pluie persistante… Le chien des Gaudreau se met à hurler, lugubre, dans les ténèbres.

Alors, sans bruit, sans qu’on n’en sût rien, ni la bonne voisine qui veillait et voulait rallumer la flammèche tremblante ; ni le petit François couché,