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Page:Diodore de Sicile - Bibliothèque historique, Delahays, 1851.djvu/60

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DIODORE DE SICILE.

très-peu large, d’une profondeur prodigieuse et d’une longueur de deux cents stades environ : il s’appelle Serbonis et fait courir, au voyageur qui s’en approche, des périls imprévus. Son bassin étant étroit comme un ruban et ses bords très-larges, il arrive qu’il se recouvre de masses de sable qu’apportent les vents continuels du midi. Ce sable fait disparaître à la vue la nappe d’eau et confond son aspect avec celui du sol. C’est ainsi que des armées entières ont été englouties par l’ignorance de ce lieu et s’étant trompées de route. Le sable, légèrement foulé, laisse d’abord la trace des pas et engage, par une funeste sécurité, les autres à suivre, jusqu’à ce qu’avertis du danger ils cherchent à se secourir au moment où il ne reste plus aucun moyen de salut. Car un homme ainsi englouti dans la fange ne peut ni nager, le mouvement du corps étant empêché, ni sortir de là, n’ayant aucun appui solide pour se soulever. Ce mélange intime d’eau et de sable constitue quelque chose de mixte où l’on ne saurait ni marcher ni naviguer. Aussi, ceux qui s’y trouvent engagés, sont entraînés jusqu’au fond de l’abîme, puisque les rives de sable s’enfoncent avec eux. Telle est la nature de ces plaines auxquelles le nom de Barathres convient parfaitement.

XXXI. Après avoir indiqué les trois points qui protègent l’Égypte du côté de la terre, nous y ajouterons ce qui nous reste à dire. Le quatrième côté, baigné presque entièrement par des flots inabordables, est défendu par la mer d’Égypte offrant un vaste trajet d’où il est difficile de gagner la terre avec sécurité. Car depuis Parœtonium en Libye jusqu’à Joppé en Cœlé-Syrie, dans une étendue de presque cinq mille stades, on ne rencontre pas de port sûr, excepté Phare. Outre cela, presque tout le côté littoral de l’Égypte est bordé par un banc de sable qui échappe aux navigateurs inexpérimentés. Croyant être sauvés des dangers qui les menaçaient en pleine mer, et faisant, dans leur ignorance, joyeusement voile vers la terre, ils se heurtent inopinément contre ces bancs, et leurs vaisseaux font naufrage. D’autres, ne pouvant distinguer la terre de loin, à cause de l’abaissement de la côte, tombent, à leur insu, soit